Le chemin de Saint-Jacques c’est avant tout des rencontres. Des rencontres plus ou moins longues, plus ou moins intenses, plus ou moins marquantes. Des rencontres le matin, le midi, le soir, à chaque moment de la journée et surtout lorsque l’on s’y attend le moins.

Pour ceux qui hésitent encore à prendre le temps de voyager à pied, j’espère que ce témoignage de rencontres sur les chemins de Saint-Jacques vous en donnera l’envie. Marcher à pied permet non seulement des économies financières, mais aussi de revenir à la base du déplacement de l’homme et de prendre le temps de réfléchir sur le monde qui nous entoure et qui va toujours plus vite. Ce mode de déplacement lent permet de belles rencontres, qui sont aujourd’hui parmi les plus intenses que j’ai pu faire.

Voici un aperçu non exhaustif de mes rencontres, le temps d’un mois de marche en octobre 2015 entre le Puy en Velay et Aire-sur-l’Adour.

Bonne lecture et bonnes marches 🙂

C’est l’histoire de trois ami(e)s habitant l’Isère qui décident de rentre visite à des ami(e)s à Condom. ils auraient pu s’y rendre en quelques heures en voiture mais ils ont préféré prendre leur temps et partir à pied. Ce qui rajoute encore du mérite à leur démarche, c’est que l’un des trois est non-voyant. Il est guidé par un bâton que les deux autres tiennent à tour de rôle.

Jeanne, j’ai marché avec elle durant près de 15 jours, elle m’a appris à prendre mon temps, à marcher au rythme des rencontre. Nous n’avions pas du tout le même rythme de marche mais des questionnements communs sur la vie.

Nicole et Véronique, deux amies de Pessenas. Elles marchent du Puy à Conques car ensuite le travail les attends. Elles ont le projet de continuer le chemin dans les années à venir. Nous nous croiserons régulièrement jusqu’à Conques. J’apprécie leurs sourires et leur bonne humeur.

Un chien qui me suivra durant plusieurs heures, entre Aubrac et Saint-Chely d’Aubrac. Il dormira même devant l’abri improvisé que j’aurais trouvé. Un vrai ange-gardien

Un chien ange-gardien

Un couple d’ancien dans un village qui proposent des boissons à la vente pour un prix modique. La conversation s’engage, la nostalgie revient et ils nous racontent comment était leur village 50 ans plus tôt. Une dizaine de familles habitaient ici, ils sont aujourd’hui 6 habitants permanents et quelques uns en plus l’été. L’école a fermé dans les années 60. J’essaye de m’imaginer la campagne française à cette époque. Cela me renvoi à quelques uns des voyages que j’ai pu faire dans des coins reculés du monde.

Une dame durant sa promenade quotidienne, un peu avant d’arriver à Conques. Elle a 74 ans et je la croise lors de sa balade quotidienne après sa journée de travail. Elle descend chaque jour à Conques aider des personnes âgées dans leur vie quotidienne. Une de ces personne va être centenaire en 2016. Elle a du mal à arrêter car elle fait cela depuis près de 40 ans et aurait l’impression de les abandonner. Elle nous raconte avec une bonne dose de nostalgie comment était la ville durant son enfance avec ses 7 épiceries (une seule en 2015), son activité…

Irek, Polonais partie de chez lui 3 mois plus tôt. Il est immense (oui plus grand que moi) et filiforme. Pourquoi est ce qu’il marche ? Des amis lui ont proposé de marcher sur un tronçon de la partie espagnole. L’expérience fut enrichissante mais trop courte pour lui. Une fois revenu chez lui, il décide de repartir à pied. Son budget quotidien est de 6 euros. Autant dire pas grand chose. Il parcourt certains jours près de 50 kms. Vers les derniers jours de ma marche, je pourrais lire dans le livre d’or d’une chapelle qu’il est passé 10 jours plus tôt.

Sol, une Sud-Coréenne, l’opposée de Irek, petite et prend son temps. Elle marche car elle aime faire de la photo. Cliché de l’asiatique. Elle passe son temps à brandir son appareil photo et à prendre tout ce qui bouge (ou non) en photo. La première fois qu’elle me prend en photo sans prévenir, cela surprend. Je la croiserais durant l’étape suivante alors qu’elle prend des photos du paysage. Elle prend son temps.

Les hospitaliers de Conques. L’hébergement en donativo (sur le principe du don) est la base du pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle. Censé aider le pèlerin quelque soit son aisance financière tout au long du chemin, ces lieux (généralement tenu par des religieux ou pratiquants, mais aussi parfois par des personnes athées) offrent le gîte et le couvert sans aucune contrepartie. Une boîte à la sortie reçoit les dons des pèlerins sans qu’il y ai le moindre contrôle. La confiance est de mise et les rentrées d’argent ne servent qu’à l’entretien du lieu, les hospitaliers étant bénévoles. Ceux qui nous reçoivent à Conques sont 5, Léonard et sa femme qui habitent ici et 3 autres personnes, un jour pèlerin, le lendemain hospitalier. C’est souvent ce qui se passe. Les pèlerins ayant appréciés l’hospitalité reçu, reviennent pour quelques temps donner à leur tour un peu de leur temps. Nous marquons notre nom dans un livre d’or. Durant deux mois, chaque matin, au moment du temps de prière, avant le petit-déjeuner, chaque nom sera lu et une intention de prière sera prononcée afin d’accompagner le pèlerin jusqu’à la fin de son périple. Une rencontre plus que marquante et une dévotion envers son prochain incroyable.

Une femme à Espeyrac, dont je ne connais même pas le prénom qui nous ouvre la maison de sa grand-mère, décédée il y a quelques mois et jusqu’à maintenant inhabitée. Elle nous en laissera le clés et s’excusera de ne pas pouvoir nous recevoir chez elle car elle a du travail.

Les gens sont merveilleux 🙂

Toutes ces personnes croisées durant 200 kms et qui s’arrêtent à Conques. Je ne sais pas grand chose d’elles mais nous nous sommes mutuellement accompagnés sur ce chemin, pas après pas.

Thomas et sa famille, Christiane et Jean-Sylvain, ses parents, et Nolwen, son amie, qui nous offriront le gîte et le couvert à Conques. Super soirée à discuter autour d’un bon repas.

Jean-Luc, un sacré personnage que l’on ne peut louper en passant à Preyssac. Au croisement de deux routes, il hèle le pèlerin et l’invite, parfois même l’oblige 🙂 à s’arrêter chez lui. Il nous régale de produits locaux cabécou de chèvre, jus de pommes artisanal à la couleur marron opaque tellement peu habituelle pour un gars de la ville mais tellement bon, kouign amann revisité à la mode averyonnaise avec de la châtaigne. Né dans ce village, il en est partie pour revenir s’installer comme agriculteur. Le coeur sur la main, il propose ce petit arrêt culinaire aux pèlerins de passage sur le principe du donativo. En repartant, nous sommes porté par le son de sa voix sur les paroles de la chanson des pèlerins. (1 min 55) Ce n’est pas lui sur la vidéo, je l’ai trouvé sur internet.

Brigitte, elle tient un gîte en donativo peu après Decazeville. Elle y accueille les pèlerins depuis près de 5 ans après avoir elle même fait le pèlerinage. Très croyante, elle a eu une révélation à cet endroit précis à l’Eglise de Saint-Roch. Son accueil est au top du top. On se sent vite chez soi même si c’est parfois gênant. En arrivant, elle veut nous enlever elle même nos chaussures de marche. Lorsque je refuse en disant que cela me gêne, elle répond « mais c’est normal ». Une dévotion incroyable. Nous sommes 5 le soir où je loge chez elle. Elle nous prépare un repas végétarien succulent avec de nombreux produits locaux. En parallèle de ses activités d’accueil, elle s’occupe du vieux Père de la paroisse, âgé de 87 ans. Il n’a plus toute sa tête et devient compliqué à gérer au quotidien, entre excès de violence et insultes. Mais il ne veut pas partir de chez lui, souhaitant finir sa vie dans son village. Je vais aider Brigitte à le coucher et j’admire encore une fois la dévotion dont elle fait preuve dans sa vie. Au réveil, elle doit partir tôt à Conques assister à une messe. Je la croise alors qu’elle s’en va. Elle me sert dans ses bras en me souhaitant bonne route. Elle est ce genre de personne qui te donne l’impression que chaque personne qu’elle croise est exceptionnelle et c’est agréable. Elle a une confiance aveugle en son prochain et laisse 5 personnes dans sa maison, le dernier fermera la porte avant de partir. Bien attendu avant de partir elle a eu le temps de dresser la table du petit-déjeuner, un repas pantagruélique, toujours à base de produits locaux.

David, mon hôte à Figeac, rencontré sur un groupe Facebook. Je ne connaissais pas grand chose sur lui et ne savait pas trop à quoi m’attendre de cette rencontre. Elle fut passionnante. J’ai passé une super soirée avec lui et un de ses amis, Philippe, à discuter de ces sujets qui me passionnent : réflexion sur le monde qui nous entoure et notre façon de consommer, sur les choix que l’on peut faire pour vivre ses rêves plutôt que de rêver sa vie. Licencié économique depuis deux mois, il projette de partir en stop en Europe à partir de janvier. Ce sera sa première fois et nous échangeons sur le contenu de son sac. Il est énorme et a prévu selon moi beaucoup trop. Cela me fait sourire et je me revois à mes débuts de globe-trotteur. Encore une super rencontre et un super accueil de quelqu’un qui ne me connaissait pas mais qui a accepté spontanément de m’héberger. C’était la première fois qu’il faisait cela. J’ai de la chance.

Djamila et Hervé, un couple habitant un hameau du nom de Béduer depuis 12 ans. Comme à chaque fois que quelqu’un m’ouvre sa porte, c’est le même sentiment de bien-être et de foi en l’humanité qui m’anime. C’est un couple adorable qui s’est formé sur le tard et n’ont par conséquent pas d’enfants. Elle vient de terminer une reconversion professionnelle, 3 années d’études d’infirmières à 45 ans. Cela me conforte dans l’idée que rien n’est figé et que tout est toujours possible. Lui est responsable du service espace vert de la ville d’à côté.

Gaël, hôte couchsurfing à Cajarc. Artiste de rue, il a vécu sur la route durant 15 ans. Ressentant aujourd’hui le besoin de se poser, il a choisi Cajarc. Il a une fille de 20 ans qui fait des études de cinéma à Montpellier. Sa chambre étant libre, il en profite pour recevoir régulièrement du monde chez lui. Lorsqu’elle est là, une caravane au fond du jardin fait office de chambre. Sa campagne Manuela nous rejoint pour le dîner. Le soir, ils nous emmènent assister à une séance de cinéma ambulant dans la salle municipale. En sortant du cinéma, alors que Gaël discute avec des amies, l’une d’entre elle me regardant me dit « tu t’appelles Guillaume ? » Un peu interloqué au premier abord, je réalise : « je t’ai fait une demande de couchsurfing ? » (rires)

Ce groupe de mamans toulousaines croisées lors d’une soirée hautes en couleurs au gîte communal de Limogne en Quercy. Elles marchent par tronçons sur le chemin au gré de leurs vacances. Elles sont 10 et disposent d’une sacré logistique. Un des maris est en camping-car et est tour à tour porteur de valises et cuisinier. L’ambiance est là et je partage le repas du soir avec eux. Au rythme où elles marchent, elles mettront bien 10 ans à arriver à Saint-Jacques de Compostelle (des étapes de 15 kms par jour pendant une dizaine de jours par an, le chemin en compte 1500 kms environ) mais leur bonne humeur et leur joie de vivre ne laisse pas indifférent.

Benoît, cette rencontre surprenante alors que je suis en train de rattraper mon retard dans l’écriture de mon journal de bord, attendant que la pluie cesse pour commencer l’étape. Il n’habite pas loin, et propose spontanément de venir manger chez lui avec Philippe, un de ces amis. Ni une ni deux, c’est partie. Il a beaucoup voyagé en France et en Europe comme artiste de rue. Il a vécu 15 ans dans un camion avant de se sédentariser dans le Tarn puis le Lot. Il vit à présent de petits boulots dans la construction. Philippe est un belge qui vit ici depuis 25 ans. N’aimant pas la Belgique et sa mentalité, il a baroudé dans le sud de la France durant de nombreuses années avant de toujours en amour pour ce coin du Lot. Il vit de la location d’une maison et de la rénovation de meubles en bois. Les deux amis ne se connaissent que depuis 6 mois mais semblent déjà être amis de longue date. Lorsque j’explique avoir été hébergé par quelqu’un sur les hauteurs de Cajarc, Philippe me dira sans hésiter « Gaël ? » Le monde est petit surtout lorsque l’on se déplace à pied.

Une rencontre sur le bord du chemin à Varaire. Une petite mamie m’accoste et nous discutons quelques instants. Elle habite dans cette maison depuis 1951. Elle appartenait auparavant à sa famille d’adoption puis elle l’a racheté. Elle a été très marquée par cette adoption et sur la boîte aux lettres on peut encore y lire son nom de famille d’adoption et de jeune fille à côté de son nom de femme mariée. Elle aime raconter des histoires sur les pèlerins qui se perdent régulièrement dans son village. En effet le chemin ne passe pas par Varaire mais le contourne. Mais comme il y a l’unique épicerie avant 20 kms, le passage est souvent obligatoire. Il y a bien un panneau à l’entrée du village, mais trop affamé, je n’ai fait attention qu’au mot « épicerie ». Un jour, une dame est passée devant sa maison et lorsqu’elle lui a expliqué que ce n’était pas le bon chemin, celle-ci ne l’a qu’à moitié cru. Ne se démontant pas et ayant probablement l’habitude de cette situation, notre petite mamie prend sa voiture, conduit notre pèlerine convaincue 1 km en amont jusqu’au fameux panneau d’indication. Et celle-ci de s’exclamer « ah il n’était pas là avant ! » (rires)

A Cahors, nouvel accueil via le couchsurfing par Emma, Cyril et leur fils Nathan, 4 ans. Ils hébergent actuellement Méléna, une amie espagnole d’Emma venue apprendre le français. Emma est une espagnole née au Mexique mais sa famille est originaire de Galice, la région de Saint-Jacques de Compostelle. Pour le moment elle ne travaille pas mais s’occupe de son fils. Elle est très branchée « éducation bienveillante » et essaie de monter une structure de type Montessori avec d’autres parents intéressés. Cyril est Français, né à Paris mais vit dans le Sud depuis l’âge de 6 ans. Engagé dans des milieux militants en faveur de l’environnement et du bio, il s’en ai éloigné, trouvant que les actions n’étaient pas assez efficaces. Passionné d’ufologie (étude des phénomènes OVNI) et d’énergie, j’essaie d’en savoir un peu plus sur ces sujets et d’enrichir mes connaissances. Cela rejoint mes questionnements sur l’origine de la vie et du sens de la vie.

Cette nouvelle rencontre prendra la forme d’un bruit, celui d’une cloche. Alors que je suis perdu au milieu de la lande, j’entends à plusieurs reprises le son d’une cloche. Je regarde autour de moi pensant apercevoir un troupeau de vaches, rien. Je continue de marcher et le son de la cloche semble me suivre. La végétation est assez rase où je me trouve et je trouve cela étrange de ne rien voir. Le mystère s’éclaircit lorsque je vois un chien passer sur le chemin devant moi. C’est lui le propriétaire de la cloche. Dans l’heure qui suivra, je le perdrais de vue à plusieurs reprises mais ce même son m’indiquera régulièrement sa présence dans les environs.

Ce petit manège durera jusqu’à ce que je croise une voiture arrêtée sur le bord de la route. Son conducteur, un chasseur, reconnaissable à son gilet orange fluo. Il me demande si je n’ai pas vu son chien : le mystère du chien vagabond est résolu.

Patricia, propriétaire d’un gîte à Montcuq (prononcer le q final). Elle a rénové une ancienne étable où chaque box est une chambre avec un lit. L’endroit est très sympa même si assez froid car mal isolé. Je discute avec Patricia qui m’explique que c’est son ex mari qui souhaitait se lancer dans l’aventure d’ouvrir un gîte. Lorsqu’ils se sont séparés, c’est elle qui a pris la suite. Elle n’est pas de la région et n’a jamais marché sur les chemins de Saint-Jacques. Il y a vraiment de tout parmi les profils des tenanciers.

Jean-Louis et Bryan, un oncle et son neveu. Ils ont commencé le chemin début juillet durant une dizaine de jours. Je les croise alors qu’ils viennent de reprendre la marche. L’oncle vit dans la région parisienne et travaillait pour France Télécom. Il est maintenant à la retraite et s’adonne à différents hobbies comme la fabrication de pain. Il me fait goûter un pain complet au miel. Il est bon mais vraiment complet et j’apprécie davantage le pain lorsqu’il est moelleux. Le neveu à 24 ans, vient de Nice et se demande quoi faire de sa vie. Le chemin semble une bonne thérapie pur nous autres les égarés de la vie 🙂

Pierre-Louis et Hugo, deux pèlerins rencontrés au gîte de l’Ancien Carmel à Moissac. Ils ont marché une semaine et le soir où je les rencontre est leur dernière nuit avant de regagner Paris. Les deux sont pratiquants et marchent pour le caractère religieux. Ils ont assisté à de nombreuses messes durant leur semaine de marche. Pierre-Louis est ingénieur. Il travaille pour une boîte de conseil. Leur client principal est la SNCF et il étudie la faisabilité et le coût de nouvelles lignes grandes vitesses. Hugo est lui aussi ingénieur mais dans le domaine aérospatial. Il vient de passer un an en Guyane.

Les deux amis se sont rencontrés en école d’ingénieur et Pierre-Louis fut le témoin de mariage d’Hugo qui s’est marié l’an passé. Ils ont chacun 25 ans.

Une rencontre toujours à Moissac mais le matin au moment du brossage de dents. Comme quoi il faut toujours être à l’écoute des rencontres. Ludivine. Elle suit une formation de quelques jours à l’Ancien Carmel sur l’art thérapeutique. C’est une discipline qui permet de mieux se recentrer sur soi-même et mieux se connaître. Elle travaille depuis 15 ans comme responsable RH dans une entreprise de 700 personnes. Elle souhaite devenir coach d’où la raison de sa formation en art thérapie, pour mieux appréhender l’humain.

François, 42, ans m’a abordé dans les rues de Moissac alors que je visitais la ville. Il est né à Thaïti et vit en France depuis ses 28 ans. Il n’est jamais retourné chez lui. Sa mère vient de Dunkerque, son père de Thaïti. Jusqu’à ses 28 ans, il a travaillé comme bucheron puis à l’entretien des lignes électriques puis à son compte avec roulotte pour vendre à manger en ambulant. A son arrivée en France, il a été pendant 3 ans chez les compagnons du devoir chez qui il a apprit la taille de la pierre. Il a ensuite travaillé pour différentes entreprises et il est maintenant au chômage. Il est descendu en ville pour faire une réparation sur son fusil de chasse. Il m’explique qu’il ne tue que les sangliers car ceux-ci ravagent les sols et se multiplient rapidement. Il relativise sur la vie. Il fume, il a eu un grave accident de moto avec plusieurs greffes et des broches et est aujourd’hui en bonne santé et capable de faire du sport sans problèmes alors que d’autres vont avoir un bête accident, tomber et devenir paraplégique. Il fait beau et j’apprécie d’autant plus cet échange impromptu. Il ne m’interroge pas sur ce que je fais (en dehors de savoir que je marche sur le chemin de Saint-Jacques). Il avait sûrement besoin de parler et moi, j’adore écouter.

J’ai rencontré Kenji le long du canal en partant de Moissac. C’est un Japonais. Il marche seulement sur la partie française car il veut découvrir la France. Il a appris le français durant 3 ans à l’école au Japon puis durant 4 ans en autodidacte grâce notamment à des émissions surYoutube : Thalassa et C dans l’air. Il m’explique qu’au Japon personne ne marche pour le plaisir de marcher. Les Japonais font quelque chose parce que tout le monde le fait. On ne prend pas ses vacances parce que personne ne les prends et que c’est mal vu. Il a prévu deux mois pour faire la partie française qui prend généralement un mois. Il prend son temps et s’arrête parfois plusieurs jours dans la même ville car une de ses passions est le dessin. Il transporte avec lui un lourd carnet de croquis où il reproduit des scènes de vies ou des façades de bâtiments avec un réalisme bluffant. Il m’apprend un mot en japonais « Matané » qui signifie « A plus tard » La particularité de la marche de Kenji, c’est qu’il est parti avec un vélo mais il fait le chemin à pied. Son vélo lui sert uniquement à se déplacer en ville. Mais il reconnaît que ce n’est pas très pratique de se déplacer à pied en poussant son vélo 🙂

Gerhard et Marie-José : deux hôtes adorables à Auvillar. Leur maison grince, craque et sens bon les temps anciens. La nuit chez eux est à 20 euros pour une chambre privée avec le petit-déjeuner. C’est un tarif très abordable et leur plaisir vient avant tout de la rencontre des pèlerins. Ils sont présent chaque matin au moment du petit-déjeuner pour partager ce moment avec leurs visiteurs. Ils sont tout les deux à la retraite et bien actif dans le village, organisant régulièrement des représentations musicales ou en organisant des activités avec les enfants (comme de la poterie le jour où je suis passé). Au moment de partir, alors que je sors mon argent, Gerhard me dit « tu vas me vexer ». En effet, la veille, j’avais demandé s’il était possible de ne payer que la nuit ne connaissant pas l’envie profonde de mes hôtes de partager ce moment de convivialité avec les pèlerins. Il m’avait expliqué très gentillement qu’il ne fallait pas que l’argent soit un frein. Ils m’ont donc invité et ce geste me touche énormément. Pas tant pour l’argent économisé que pour la discussion que j’ai eu avec eux sur le pas de leur porte juste avant de repartir. Nous avons parlé de la philosophie du chemin, d’entraide… Marie-José évoque cette question d’équilibre dans l’aide et cela fait écho en moi. Quand on aide quelqu’un, il ne faut pas attendre de celui-ci qu’il nous aide en retour mais qu’il aide à son tour quelqu’un d’autre. Cela créé une boucle où chacun est à la fois « aidant » et « aidé » Un grand merci à vous deux, vous m’avez redonné la motivation à un moment où mon moral était en baisse.

Rencontres en pagailles à l’auberge de Lectour.

Tilman, un Allemand. Il marche car il y songeait depuis plusieurs années. Il se trouve actuellement entre deux travails et dispose d’un peu de temps. Il est ingénieur dans la construction.

Laurent, un Français. Il marche pour réfléchir, se changer les idées et faire le vide. Il est parti du Puy-en-Velay 3 jours après moi. Lorsqu’il a commencé à marcher, il a arrêté de fumer alors que c’était un gros fumeur.

Mauro, un Suisso-Italien. Il a un restaurant en Suisse-Allemande. Il part à Saint-Jacques rendre visite à sa fille. Elle habite Vigo, au Sud de Saint-Jacques.

Sébastien, un Français, avec qui je marche durant toute une jounrée. Il vient de quitter un travail qui ne lui correspondait plus pour se lancer dans une nouvelle aventure entrepreneuriale. Afin de se laisser du temps et la réflexion nécessaire pour ce changement de cap, il décide de marcher durant un mois.

Dernières personnes rencontrées sur le chemin, mes hôtes couchsurfing à Aire-sur-l’Adour, Laetitia et Samuel. Nous avons le même âge, 28 ans. Laetitia est professeur des écoles remplaçantes. Elle a une classe de CM2. Elle s’intéresse aux pédagogies alternatives et envisage de partir au Népal l’été prochain dans un orphelinat. Samuel a créé une star-up avec 2 autres amis dans le domaine du e-commerce. Ils ont créé un logiciel qui permet aux sites d’analyser la façon dont les potentiels clients visitent leur site avant de faire ou non un achat.

Je ne reverrais à priori que peu de ces rencontres mais chacune d’entre elle m’a marqué et j’ai vraiment découvert chacune d’entre elle avec la même curiosité que si elle allait devenir mon meilleur ami.

Il n’y a pas de classification dans ces rencontres, elles sont simplement dans l’ordre où je les ai faites. Chacune de ces rencontres était unique, intense, extraordinaire, intéressante.

Durant toute ma marche, je me suis nourris de ces moments d’échanges.

Un grand merci à vous tous pour ces moments partagés !

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