Après un premier volontariat à Minca, suivi de quelques semaines de tourisme entre Carthagène, Bogota et ses environs, j’avais envie de donner de nouveau de mon temps. J’ai découvert l’organisation Habitat Sur grâce à une personne rencontrée à Caux en Suisse, l’été dernier, dans le cadre d’un autre programme de volontariat.

Habitat Sur est une organisation située à Leticia, au sud-est de la Colombie, au milieu de la forêt amazonienne. Pour s’y rendre, à partir de Bogota, une seule solution, l’avion.

L’aéroport de Leticia c’est un peu comme celui de Port Vila au Vanuatu (40000 habitants dans ces deux villes), à peine descendu de l’avion, en une centaine de mètres, nous nous retrouvons dans le terminal de sortie. L’atmosphère est à nouveau chaude et humide, comme sur la côte Caraïbe. Les bagages arrivent rapidement et sont déposés sur l’unique tapis roulant qui commence à montrer des signes de faiblesse. Avant de sortir, il nous faudra nous acquitter d’une taxe touristique de 30 000 pesos.

En sortant de l’aéroport, quelques taxis nous proposent de nous emmener dans le centre-ville. Il n’y a pas de bus mais on peut s’y rendre à pied en une vingtaine de minutes.
Je partage un taxi avec deux français rencontrés à la sortie de l’aéroport et cinq minutes plus tard, nous arrivons dans le centre ville. J’ai une vague idée de comment me rendre à l’association grâce à Nathalie, qui habite en Suisse et sert de relais « internet », profitant d’une connexion régulière. Je demande un complément d’informations dans deux auberges afin de pouvoir comparer les réponses. Je dois me rendre à un parc d’où partent les bus. Si vous souhaitez développer des compétences en autonomie, prise de décision ou tout simplement sortir de votre zone de confort, je ne peux que vous conseillez des pays comme la Colombie.

« Seulement transports collectifs »

(A partir de là, je ne vous en dis pas plus, si vraiment vous souhaitez donner un coup de main, vous pouvez prendre contact avec les membres de l’association via leur site web)

Habitat Sur

Lorsque j’arrive sur place je rencontre les 4 personnes qui y vivent en ce moment : le couple fondateur, Adriana (colombienne) et Hervé (suisse), qui habitent ici à l’année et un autre couple de Suisse, Heidi et Christophe, qui sont venus donner un coup de main durant six mois.
Je tombe immédiatement sous le charme des lieux, des constructions intégrées dans la végétation et de tous ces d’arbres et ces plantes incroyables qui nous entourent… Chaque recoin est un trésor d’imagination et de récupération : de la récupération dans tous les sens mais avec un aspect très sympa et pas du tout fait à la va-vite.

Vestiges de voitures qui servent aujourd’hui de bac à fleurs

Une lagune qui se remplit et se vide en fonction des précipitations

Vue sur la jungle

La maison d’Adriana et Hervé

Lieu de vie des volontaires

Nuit en hamac avec moustiquaires intégrées

 

La cuisine avec les trois poubelles : vert pour le compostable, bleu pour le recyclable et rouge pour le reste

 

Six douches, six toilettes et un espace de lavage, du luxe

Bouchons plastiques pour créer un sol anti-dérapant : rien ne se perd, tout se transforme…

 

Le combi de l’association

 

Branches de palmier tressées pour recouvrir les toits : étanchéité garantie

 

 

La bonne idée en matière de gestion déchets, c’est de remplir des bouteilles en plastique avec tout les déchets plastiques. Une fois remplie à son maximum, cela fait comme des briques qui peuvent servir à la construction de murs. Evidemment, c’est encore mieux de ne pas utiliser de plastiques mais en Colombie c’est quelque chose d’assez compliqué. Je dois sans cesse dire que je ne souhaite pas de sacs dans les supermarchés. La main-d’oeuvre ne coûtant pas cher, il y a toujours une personne qui met en sac automatiquement vos courses en plus du caissier. En outre, le conditionnement est souvent en très petites unités ce qui par conséquent favorise la production massive de plastique. Mais une loi en application depuis le 1er janvier 2017 limite l’utilisation de sacs plastiques dans les magasins par exemple. C’est déjà une bonne chose.
L’Amazonie représente à elle seule une bonne partie de la diversité mondiale. Je n’ai pas encore fini de compter mais j’ai néanmoins pu observer de nombreux insectes que je n’avais encore jamais vu ailleurs : des mille-pattes aux couleurs étranges, des chenilles toutes poilues, des insectes volants en tout genre, ma première tarentule qui d’ailleurs, n’a pas manqué de m’effrayer… Au bout de 5 jours, n’arrivant vraiment pas à dormir confortablement dans le hamac, je voulais profiter du canapé dans la pièce de vie afin de passer une nuit plus reposante. Mais lorsque j’ai voulu aller me coucher après avoir fini mon film et que j’ai aperçu ma première tarentule à côté de moi qui regardait tranquillement le film en ma compagnie, je me suis dit que finalement un hamac avec moustiquaire intégrée ce n’était pas si mal que ça. Et lorsqu’au petit matin, bien à l’abri sous cette protection, j’entends, puis je vois une armée de moustiques, je dois bien avouer que je ne suis jamais bien pressé d’en sortir.
J’ai eu la chance d’accompagner les employés de la réserve dans la jungle pour aller couper des arbres afin de construire un pont. Spectacle étonnant que cet enchevêtrement d’arbres, de lianes et de plantes. On se sent tout petit face à l’immensité de la nature.

Heidi et Christophe

Ils travaillent plus spécialement sur la qualité du sol car contrairement à une idée reçue, le sol de l’Amazonie est peu fertile. Ils essayent donc de développer un engrais naturel à base de compost et de charbon afin de rendre le sol argileux de l’Amazonie plus propice à la culture.

Système de four mis au point par Heidi qu’elle teste durant ces six mois de stage dans l’idée de le reproduire à plus grande échelle.

Résultat, de la combustion des végétaux : du charbon près à l’emploi

Stockage des végétaux en attente de transformation

 

Simulation de différentes textures de sols afin d’analyser les plus propices à la pousse des végétaux

 

Et pour rester autonome, des graines sont mises à sécher pour les planter la saison prochaine

Avec Heidi et Christophe, nous sommes tous les trois en phase d’apprentissage de l’espagnol, c’est donc la langue que nous parlons ensemble et cela donne des situations assez comiques… Pas facile de se forcer à parler une langue que nous maîtrisons à moitié alors que nous pourrions tous parler anglais pour communiquer plus facilement. Mais c’est comme cela que l’on apprend !
Un soir, ils me disent qu’il va pleuvoir d’ici dix minutes, et moins de deux minutes plus tard, c’est le déluge. Ils sont là depuis deux mois et commencent à connaître les caprices du ciel. Comme le toit est en tôle, le bruit nous empêche rapidement de pouvoir parler. Heureusement, ce genre de pluie ne dure jamais bien longtemps et nous avons pu dormir dans le calme. Le toit des habitations traditionnelles est généralement recouvert de feuilles de palmier ce qui leur procure une bonne étanchéité naturelle. Cependant, si la bâtiment est trop grand, comme c’est le cas de celui sous lequel nous dormons, celui-ci est recouvert de tôles.
Les jours de grosse chaleur, la tôle « gémit » et émet comme un bruit de gouttes d’eau… L’effet est bluffant mais simplement dû à la déformation de la tôle sous l’effet de la chaleur.

Atelier avec les enfants

Durant ces quelques jours de volontariat, j’ai eu l’occasion de participer à un atelier avec des enfants des communautés alentour. L’idée était de les questionner sur leurs habitudes quotidiennes pour ensuite effectuer le même travail avec des enfants au Kenya et créer un échange autour des similitudes de leurs vies. En effet, on se focalise bien trop souvent sur les différences mais entre des enfants du monde entier, il y a aussi pas mal de ressemblances. Cela est d’autant plus vrai entre des enfants kényans et colombiens vivant sous les même latitudes, où la nourriture, l’habitat et certains habitudes culturelles sont finalement plus proches qu’avec des enfants français par exemple. Il est difficile d’imaginer la vie des enfants à Leticia. La plupart ne sont jamais sortis de leur communauté et leur horizon se limite aux quelques kilomètres alentour. Difficile pour moi d’imaginer cela alors que je suis toujours à la recherche du prochain « kilomètre ». Ils sont donc très contents de monter en voiture pour quelques kilomètres afin de nous rendre au centre culturel construit par l’association. Le transport est un vieux combi VW, la rolls du véhicule pour tout backpacker souhaitant partir en roadtrip… Le démarrage est capricieux et au moment d’enclencher la première, le moteur fait trembler l’habitacle, ce qui ne manque pas de réjouir les enfants qui se mettent à crier et à rire en cadence.

La route ne permet le passage que d’un véhicule à la fois et il faut donc parfois faire preuve de patience.

 

Tout au long de ces trois jours d’activités avec les enfants, nous avons travaillé sur les questions qu’ils aimeraient poser à leurs homologues kényans, leurs habitudes alimentaires, la faune et la flore les entourant, les contes… Deux réponses m’ont notamment marqué : votre nourriture préférée et qu’est ce que vous voulez faire plus tard ? La plupart ont écrit que leur plat préféré est le riz avec du poulet… Forcément, comme c’est le plat principal et le moins cher, ils ont peu d’autres références de comparaison. Nombreux sont ceux qui veulent être docteur ou footballeur professionnel, des réponses que l’on peut finalement retrouver sortant de la bouche d’enfants partout autour du monde.

Le début du chemin est bétonné

 

Cimetière de vélos

Certaines habitations ne payent pas de mine mais disposent néanmoins d’un accès satellitaire à la télévision.

Mais le chemin de terre à la fin est parfois inondé.

Le centre culturel

 

L’escalier serpent permettant d’accéder à l’étage

 

Les contes de notre enfance

Atelier dessin sur ce qu’ils ont retenu du conte

Quels sont les végétaux que vous reconnaissez autour de vous ?

 

Rafa, mordu de lecture alors qu’il n’a que trois ans.

 

Séance relooking avec Jennifer.

 

A six ça craque (ce qui n’a pas manqué d’arriver)

Tout le monde a bien travaillé et peut revenir chez lui avec une revue qui est une compilation des différents travaux réalisés par chacun des enfants

 

Moment détente avant de rentrer chez soi

Le combi nous ayant lâché sur le retour, nous avons été pris en stop par un pick-up pour le plus grand bonheur des enfants.

 

Alors qui veut donner un coup de main ?

Si vous envisagez de voyager en Amérique du Sud, je ne peux que vous conseiller de venir donner de votre temps pour cette organisation. J’ai adoré ces quelques jours à Habitat Sur. Adriana et Hervé sont vraiment un couple charmant et facile à vivre. Mais pour apprécier encore plus votre séjour ici, acceptez d’y passer du temps et encore mieux, venez avec votre projet comme Heidi et Christophe.

Vivre à Habitat Sur c’est se couper du monde qu’on le veuille ou non et c’est bien ce que je cherchais à faire durant ce voyage. Je passe énormément de temps sur les réseaux sociaux et il m’est difficile de déconnecter sans en avoir l’obligation. Ici pas le choix, Leticia se trouve à 30 minutes de transport et il ne passe que trois bus par jour. Les conditions parfaites pour un retour à la nature. Pas un bruit de moteur ne vient ternir la quiétude des lieux. Le soir, l’Amazonie se réveille et laisse entendre ses multiples bruits, bruits de grillons, bruits de grenouilles, quelques bruits d’oiseaux… La nature à l’état pur, le chant de l’Amazonie !

Que faire à Leticia ?

Leticia se trouve à la frontière avec le Brésil et le Pérou, il est donc possible d’aller dans trois pays différents en moins d’une heure. Pour vous rendre au Brésil, il faut emprunter l’unique voie en double sens de la ville, appelée « Avenida Internacional », qui vous mènera jusqu’à la ville de Tabatinga. Pour le Pérou, il faut prendre un bateau et traverser le fleuve pour vous rendre en cinq minutes sur la « Isla Santa Rosa », la frontière se situant au milieu du fleuve.

Bienvenue au Brésil (j’y ai passé 10 minutes)

Prenez le temps de visiter la bibliothèque municipale et le musée ethnologique de Leticia dont l’entrée est gratuite.

A croire qu’il y avait une réduction sur la peinture rose…

 

Vous pourrez y voir d’authentiques coiffures indiennes faites avec des plumes comme dans les films

Habitat Sur c’est aussi des bibliothèques dans de vieux frigos en libre-service plusieurs après-midi chaque semaine. Les enfants peuvent venir y consulter les livres sous la supervision d’un adulte.

Magnifique sculpture sur un vieux tronc d’arbre

 

Les dauphins roses de l’Amazonie que je n’ai malheureusement pas eu la chance de voir.

L’un des deux ronds-points de la ville

Encore une chouette expérience hors des sentiers battus, vive le volontariat et le fait qu’il facilite les rencontres et l’immersion dans un pays et sa culture.

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