Qui êtes vous ?

Je m’appelle Victor, je suis un chercheur, anthropologue. Je travaille ici à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) mais à l’origine je suis un chercheur de l’INSERM, l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale.

(Que cherchez-vous en ce moment ? Vous travaillez sur quoi ?)

Je travaille sur le fait que nous nous parlons à nous même et ce que cela signifie sur notre humanité, sur la forme qu’à prise notre humanité, sur beaucoup d’aspects, sur notre pensée, sur la posture morale que nous avons, pourquoi nous nous sentons indignés par certains choses, pourquoi nous avons un certain sentiment de justice ou d’injustice.

Cela peut paraît étrange, après tout pourquoi se parler à soi-même ? On pourrait dire « pourquoi se dire quelque chose que nous savons déjà ? » or en réalité, nous ne le savons pas, il faut le dire et c’est une façon de créer une forme d’intériorité, un recul face au monde. Quand vous parlez à vous même, vous déconnecter du monde que vous percevez et en quelque sorte vous tourner le regard vers l’intérieur, ce monde à vous qui vous permet de réfléchir. Non pas que la pensée est toujours verbale mais c’est un moteur important. Mais il y a des choses qui ne peuvent pas s’exprimer par la parole. Notre langue ne serait pas la même si nous ne pouvions pas nous parler à nous même.

D’ailleurs souvent quand nous parlons aux autres, d’une certaine façon nous nous parlons à nous même par la même occasion.

Le fait même aussi de vous parler à vous même crée une sorte de dédoublement. D’ailleurs on s’adresse  à soi même avec le tu « qu’est ce que tu t’imagines ? », « qu’est ce que tu voulais faire ? », parfois on dit je, parfois on utilise la troisième personne, c’est plus rare mais on l’utilise aussi.

Mais ce dédoublement cela crée aussi une attitude, une posture morale. C’est le fait que par exemple vous cherchez une sorte d’harmonie puisque si vous n’êtes pas d’accord avec d’autres personnes, vous pouvez vous en aller. Mais si vous n’êtes pas d’accord avec vous même, il faut faire avec. Il y a donc une certaine recherche d’harmonie. Et cette recherche d’harmonie d’une certaine façon vous impose une certaine posture morale. Je ne peux pas vivre avec un individu méprisable. Alors je peux évidemment me mentir, on y arrive très bien. On peut plus facilement se mentir à soi même qu’aux autres. On peut aussi vivre dans le déni, chercher à oublier mais il n’en reste pas moins que vous avez besoin de cette attitude pour retrouver l’harmonie avec vous-même et donc la posture morale. Le contenu moral est donné par la société qui considère ce qui est bien, ce qui est mal. Ce n’est pas vous qui le décidez, vous en héritez avec la société dans laquelle vous êtes né. Mais la posture morale ce n’est pas le contenu moral, c’est l’attitude vis-à-vis et c’est ce besoin d’harmonie.

J’aime la vie pour commencer, la littérature, le cinéma, la bonne nourriture, l’alcool, la cuisine.

(quel est votre livre du moment ?)

C’est un polar, d’un écrivain Polonais (Zygmunt Miloszewski) qui s’appelle Un Fond de vérité.

Je n’aime pas l’ennui, la médiocrité… c’est difficile à dire.

Quel est votre rêve dans la vie ?

On aimerait toujours être plus beau plus intelligent, plus jeune (rire) qu’on était mais actuellement mes rêves sont d’une banalité assez limitée. J’aimerais tout simplement bien terminer le bouquin que je suis en train d’écrire.

Je ne saurais pas dire. Vous savez cela dépend du moment. A d’autre moment vous m’auriez abordé je vous aurait dit facilement un bon souvenir. Là je n’ai rien de spécial je suis rentré de vacances il n’y a pas très longtemps mais je n’ai pas grand chose à dire. Je viens de reprendre mon travail, je suis descendu pour fumer une cigarette en réfléchissant.

Quelle est la chose la plus folle que vous ayez faite ?

Je n’ai pas fait de grandes folies. J’ai fait des choses qui peuvent parfois impressionner les autres, ils considèrent cela comme une folie mais pas moi.

(comme quoi ?)

J’ai quitté un pays pour aller vivre dans un autre, et puis ensuite dans un autre et finalement je suis resté.

(De quel pays êtes vous originaire ?)

Je suis né en Pologne, j’ai vécu en Israël et ensuite en France.

Votre journée en un mot ?

C’est une espèce de journée paresseuse, incertaine, on est rentré mais pas encore vraiment rentré, il fait chaud, ce n’est pas encore l’activité débordante de la rentrée.

Quelle est votre définition du bonheur ?

Est ce que j’aurais une définition du bonheur ? C’est difficile à dire parce que voyez vous on nous a convaincu depuis un quelque temps que la vie consiste à aspirer un bonheur et qu’un bonheur est promis et qu’il suffit de le saisir. Il y a des moments de bonheur et subjectivement on peut imaginer que certaines personnes vivent un bonheur, que certains moments que l’on a vécu étaient des moments de bonheur mais le bonheur n’est pas forcement quelque chose qui appartient nécessairement à la vie. C’est un cadeau, souvent momentané, souvent reconnu rétrospectivement.

Ou alors des espèces de moments ou vous mettez dans l’herbe, il fait beau et vous vous dites « quel bonheur ! » mais c’est un bonheur niais qui n’a pas beaucoup d’intérêt.

Le bonheur est souvent lié à un souvenir nostalgique du passé.

Une citation, un proverbe qui vous guide dans la vie ?

Non, il pourrait y en avoir beaucoup mais il n’y a rien de spécial qui me vienne à l’esprit.

Non parce que cela m’amènerait à me forcer et comme rien ne me vient je ne préfère pas

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