J’avais pour habitude d’interviewer des personnes rencontrées au hasard de mes déambulations et de leur poser différentes questions. Cette fois-ci, le dialogue fut difficile n’ayant pas de langue commune mais ce fut néanmoins un moment fort pour moi.

Je rencontre Anan alors que je marchais dans les rues de Chaiya, une petite ville dans le sud de la Thaïlande. Il n’y a pas grand chose à faire dans cette ville sinon une méditation dans un temple à l’écart de la ville. C’était le but de ma visite dans cette ville, je venais de quitter le temple le matin même et ayant 10 heures à attendre avant le départ de mon train le soir, j’en profitais pour me balader. Dans cette ville non touristique, les rencontres sont nettement plus sympa, désintéressées et chaleureuses.

Anan, c’est ce gars qui m’interpelle de l’autre côté de la rue et qui m’invite avec des gestes à venir le voir. J’obtempère par curiosité. Il discute avec un groupe de Thaïlandais(e)s devant sa boutique. Malgré l’absence d’une langue commune, nous échangeons par le regard et les gestes. Il m’offre à manger quelque chose de bizarre, je crois de la noix de coco qui trempait dans un liquide. C’est assez élastique comme matière mais pas mauvais. J’enchaîne avec de la citrouille bouillie.

En l’espace de quelques instants, cette rencontre authentique me réconcilie avec tout un pays, tout un mois de voyage 🙂

Il est couturier et ne semble pas avoir beaucoup de clients. En même temps nous sommes le 5 décembre, jour férié pour l’anniversaire du Roi (88 ans). C’est quelque chose qui m’a toujours marqué dans ces pays où les notions de temps et de rentabilité n’existe pas. Chacun est commerçant et semble passer la majeure partie de son temps devant sa boutique à discuter avec son voisin.

L’après-midi passe, des gens vont et viennent, saluent mon hôte. Certains s’arrêtent pour discuter plus longuement. A chaque fois il y a un petit quelque chose à grignoter. J’ai le droit à une séance photo à chaque visite, chacun possédant un smartphone dernier cri.

Anan a déjà pris une photo de nous deux qu’il a mise en fond d’écran sur son téléphone. Il l’affiche fièrement à qui vient lui rendre visite. Chacun rigole en voyant cela.

Ces instants valent bien toutes les méditations du monde : un moment simple, sans échange monétaire, avec peu de mots, la simplicité des choses et des rencontres, vivre l’instant présent…

Je savoure ces instants magiques où j’écoute en silence mes « amis » Thaïlandais échanger sans que j’en comprenne un traître mot. Je suis aux anges. C’est un de ces moments où les mots ne servent à rien mais finalement cela importe peu.

Lorsque l’on est blanc dans un endroit peu touristique, toute notre personne est une attraction. C’est le cas de mes mains, qu’Anan observe, touche, inspecte et, remarquant de la corne à la base des doigts m’interroge du regard, dit trois mots à sa voisine qui me sort « work ? »

La question routinière que j’attendais à un moment ou à un autre de l’après-midi arrive sous la forme d’un simple mot « girlfriend ? ». Question lancée innocemment par une femme qui maîtrise trois mots d’anglais au moment où arrive une fille dans la vingtaine.

Pendant ce temps dans l’arrière boutique, une femme tire son lait dans un biberon.

Le temps passe et je prend congé de mes hôtes. Même si je connaîtrais peu de choses de ma rencontre du jour, elle aura été forte en émotions.

Pin It on Pinterest

Share This