Attention, à la lecture de cet article assez critique vis-à-vis du volontariat, ne m’en voulez pas, je ne jette la pierre à personne. J’ai moi-même effectué à plusieurs reprises des missions de volontariat (Cambodge, Haïti, Mali, Burkina Faso et Vanuatu). Je critique seulement un certain type de volontariat, pas l’idée de donner de son temps bénévolement et généreusement.
Mais avant de parler de volontariat, il me semble important et nécessaire de définir ce terme. Selon moi c’est un mot fourre tout. Il peut désigner à la fois du bénévolat, du volontariat courte durée, longue durée, indemnisé, payant… On utilise généralement le mot bénévolat lorsque l’on est en France et volontariat lorsque l’on est à l’étranger. En anglais, le mot « volunteer » désigne à la fois le volontariat et le bénévolat. Attention donc lorsque vous parlez avec des anglophones d’être bien au clair sur les termes utilisés.
Je ne parlerais pas du volontariat longue durée, généralement indemnisé (VSI, SCI…) qui pourrait faire l’objet d’un autre article car ce que j’exprime ici ne s’applique pas (ou que partiellement à ce type de volontariat).
Je ne parlerais pas non plus du volontariat où il est demandé une participation conséquente aux frais du voyage (billet d’avion, vie sur place…) et généralement encadré par un organisme dans le pays d’origine du volontaire. Je trouve que ce type de volontariat est biaisé dès le départ car le fait de payer quelque chose implique d’être dans une relation cliente et d’avoir des attentes et d’en vouloir pour son argent.
Je parlerais dans cet article du volontariat bénévole de courte durée que l’on peut effectuer typiquement à destination des enfants, dans une école ou un orphelinat lors d’un voyage à l’étranger.
Ce type de volontariat revient régulièrement lorsque quelqu’un revient d’un séjour à l’étranger d’un pays en développement. C’est quelque chose que l’on peut facilement faire dans des pays avec un niveau de développement moindre par rapport à nos standards occidentaux. Deux raisons principales à cela : les besoins importants en terme d’éducation et le manque de financement pour combler ces besoins. Des volontaires occidentaux qui viennent donner de leur temps bénévolement et qui même parfois sont près à payer pour vivre une expérience « authentique » dans un village de brousse, quelle aubaine !
Dans cet article je vous donne quelques informations pratiques et vous explique selon moi quelles sont les limites du volontariat et pourquoi il faut néanmoins partir faire du volontariat.. Je prendrais comme exemple mon expérience la plus récente dans une école au Cambodge.



Comment trouver une mission de volontariat ?
Internet reste le moyen le plus facile (mais pas forcement le plus fiable). En faisant une recherche rapide sur un moteur de recherche vous trouverez des centaines de lieux et d’organismes. N’hésitez pas à consulter les forums et blogs de voyages, les groupes Facebook dédiés à cette thématique. Plus vous obtiendrez d’informations de sources différentes, plus il sera facile de partir sereinement.
Vous pouvez aussi demander autour de vous, dans votre réseau familial et amical. C’est encore mieux de connaître quelqu’un directement et de pouvoir lui poser toutes nos questions et inquiétudes.
A destination de qui ?
En théorie, n’importe quelle personne avec de la bonne volonté et qui souhaite donner de son temps et de son énergie pour aider. Mais en pratique, il est préférable d’avoir un minimum de compétences pour la mission demandée : parler anglais correctement s’il l’on va donner des cours, avoir des notions d’animation s’il l’on va dans une école organisé des jeux pour les enfants, avoir des notions de construction si l’on part sur un chantier de rénovation/construction…
Dans le cas contraire, vous serez surtout une contrainte et une perte de temps pour les personnes localement car elles devront être derrière vous et vous apprendre (ce pour quoi vous étiez initialement censé être compétent)
Quel coût ?
Par de réponse précise ici, chaque structure à une politique différente. Je privilégie les structures qui ne demandent qu’une participation aux frais de logement et nourriture. Je pars du principe que je donne de mon temps bénévolement. Je trouve cela normal de participer aux frais générés par ma présence mais je ne veux pas en plus financer la construction de la maison du responsable de l’école (véridique). Bénévole oui, pigeon non.
Quelle durée ?
Là encore pas de réponse toute faite. L’occidental est pressé et veut du résultat immédiat. Malheureusement cela ne se passe pas comme cela et plus longtemps vous resterez, mieux ce sera. Lors de mes différents voyages, j’ai réellement commencé à me sentir dans mon élément et à comprendre les locaux au bout de 4-5 mois.



Si je reste assez critique vis-à-vis du volontariat c’est que je trouve qu’il y a de plusieurs limites à ce type d’action.
Les limites du volontariat
- prendre conscience que l’on ne changera pas la face du monde : « non petit blanc tu ne changeras pas la face du monde en venant quelques jours, semaines donner des cours dans un orphelinat, dans une école à l’autre bout du monde même si tu es plein de bonne volonté (et c’est déjà très bien mais il faut juste être conscient de nos limites) »
- certaines structures accueillent parfois plus de volontaires que nécessaire sans se réellement savoir s’il y aura du travail pour chacun. Cela part de la vision tronquée selon laquelle la présence de l’homme blanc est bénéfique en soi. Difficile de dire non à des jeunes occidentaux qui veulent venir aider et qui généreront par leur simple présence une manne financière non négligeable. Lorsque j’étais à Haïti, j’ai soigné une petite blessure et mis un pansement à un enfant et soudainement j’étais presque un médecin (rires), on venait me voir pour tout et n’importe quoi ensuite. Si cela prêtait à sourire sur le moment et me donnait un sentiment d’importance, cela montre bien la différence de perception entre les cultures.
- les attentes sont différentes et parfois ne se rencontrent pas : l’occidental est pressé par nature, il vient donner quelques semaines de son temps et rage de ne pas voir d’évolution, s’étonne du manque d’assiduité des enfants et profs locaux, de l’autre côté, les enfants quand à eux savent que le blanc n’est qu’un parmi tant d’autres, qu’il restera quelques semaines, quelques mois pour les plus aventureux, ils s’attachent mais en même temps est conscient que ce sera comme d’habitude, éphemère. D’où un désabusement qui peut amener à un manque d’implication (mais comment leur en vouloir ?)



Expérience de volontariat au Cambodge
Lors de mon dernier séjour en Asie, j’ai eu l’occasion de vivre quelques jours dans une école au Cambodge près de Siem Reap dans le Nord du pays. Cette expérience fut courte (3 jours) mais a reflété ce que j’ai déjà pu vivre par le passé et c’est pour cela que je me permet de le mettre en avant dans cet article. Le directeur à 8 enfants à charge et habite sur le même terrain que l’école. Il a fait construire les bâtiments il y a quelques années car il jugeait que l’enseignement proposé dans les écoles cambodgiennes classiques n’était pas au niveau. Il propose des cours de langues aux enfants, en théorie l’après-midi, les enfants étant à l’école classique le matin. Les cours et fournitures scolaires sont gratuits pour les enfants et entièrement financé par la présence des volontaires. Il est demandé une participation de 5 euros par jour de présence. Il y a deux classes de deux niveaux pour les petits (8-10 ans) et grands (10-12 ans), l’après-midi avec deux heures d’études pour les adolescents le soir.
Les volontaires sont logés derrière l’école dans un bâtiment en dur construit par le directeur. le confort est sommaire mais correct, une moustiquaire est fournie, il y a un matelas sur certains des lits, ventilateurs si besoin… Les repas sont préparés par la femme du directeur. Souvent à base de riz bien entendu. La nourriture est bonne mais à la longue peut paraître redondante. Il y a un marché pas très loin où il est possible d’acheter d’autres produits plus occidentaux. Il n’y a pas grand chose à faire dans les environs immédiats mais Siem Reap se trouve à 30 minutes en tuk-tuk.



Les raisons de faire du volontariat
Mais malgré ce portrait assez pessimiste sous certains aspects du volontariat, je ne peux que vous inciter à partir et expérimenter cette forme de voyage (tout en prenant en compte les limites de votre action comme énoncé ci-dessus)
- meilleure compréhension d’une culture étrangère, ouverture d’esprit
- se prendre des claques virtuelles (comprendre se remettre en question sur ses pratiques et sa façon de penser)
- prendre conscience que l’on ne changera pas le monde
- revenir avec une autre vision du volontariat
- intéressant de passer du temps au même endroit lors d’un long voyage autour du monde et de prendre conscience que vouloir en voir toujours plus n’est pas forcement viable ni intéressant.
- ce type d’échange est à la fois intéressant pour les volontaires, pour les enfants et pour les profs locaux : travail sur la différence de culture, ouverture d’esprit compréhension, meilleure arme contre l’intolérance et pour la paix



Quelques conseils
Pour qu’une action de volontariat soit bénéfique, voici mes quelques conseils :
- Posez-vous la question si une association française ferait appel à vos services pour le même type de travail ? Si non, il est temps de vous remettre en question et de vous demander pourquoi des personnes qui vivent dans des conditions de précarité dans un pays plus pauvre que le votre auraient besoin de votre aide ? Parce qu’ils n’ont rien ? La pitié et la commisération n’ont jamais permit à des personnes de grandir et de gagner en autonomie.
- Vous avez trouvé une structure localement qui vous intéresse, vous échangez depuis quelques temps avec un responsable localement, n’hésitez pas à poser toutes les questions qui vous viennent à l’esprit même celles qui vous semblent stupides. Par les réponses apportées, vous aurez déjà un aperçu de la fiabilité de la structure et des missions proposées
- est ce que la personne en charge a déjà vécu à l’étranger ? C’est pour moi l’un des points essentiels. Il est impossible de comprendre une culture étrangère s’il l’ont n’a pas vécu à l’étranger d’où une mauvaise vision des occidentaux et de leurs attentes. Les projets les plus intéressants auxquels j’ai participé l’était lorsque la personne responsable avait vécu en France par exemple.
- allez à l’intuition 🙂 il est parfois nécessaire d’arrêter de trop réfléchir et de vivre sa vie tout simplement, on fait des erreurs, c’est ce qui permet de progresser, l’important étant de se questionner en permanence sur nos choix.






Que pensez-vous de ce constat vis-à-vis du volontariat ? Je suis curieux d’échanger à ce sujet avec vous.
Bonjour ! en tant que prof qualifiée, ce genre d’expériences me laisse un peu sceptique. Je ne pense pas qu’on puisse « aider » ni avoir un quelconque impact en restant seulement trois jours dans une école. D’après tes photos, c’était donc des cours d’anglais sur l’heure : une liaison a-t-elle été effectuée entre toi, les précédents bénévoles et les suivants ? comment s’assurer de la compétence de « l’enseignant » ? et qui sait, ces enfants « apprendront » peut-être l’heure 10 fois cette année s’il n’y a pas de programme ni de coordination… comment prendre le temps d’apprendre leurs noms, d’échanger sur une durée aussi courte ? qu’est-ce que tu en as retiré en fait ?
Bonsoir, je suis entièrement d’accord avec toi, c’est justement ce que je mets en avant dans cet article. Le fait que de vouloir simplement aider n’est pas suffisant et qu’il faut avoir de réelles compétences pour aider et non pas simplement de la bonne volonté. Dans le cas de ces 3 jours dans une école au Cambodge, ce n’était pas à proprement parlé une expérience de volontariat mais plutôt le constat que j’avais déjà pu constater dans d’autres endroits et que je décris dans cet article. Il se trouve que le monde est petit et que j’ai retrouvé un ami à Siem Reap et que je l’ai accompagné durant ces 3 derniers jours dans cet école. Je sais pertinemment que je n’ai pas aidé ces enfants et que tout ce que tu mets en avant dans ton commentaire est malheureusement vrai : les volontaires s’enchaînent sans coordination et qu’ils ont du apprendre l’heure et les chiffres déjà de nombreuses fois… Mais à chaque fois j’en retire des discussions intéressantes avec les autres volontaires, avec le directeur et chacun progresse à sa mesure dans la compréhension de l’autre culture.
Je ne suis pas bien d’accord tout d’abord avec les raisons du pourquoi ce genre de volontariat, tu parles d’un manque d’enseignement notamment dans les zones rurales, oui surement, mais ce qui permet à ce volontariat d’exister est aussi et surtout un manque de contrôle des autorités locales et un manque de suivi. C’est d’ailleurs pour ça que dans certains pays, des lois « répressives » contre des ONG sont prises, et que le gouvernement essaye de renforcer ses contrôles sur la société civile. Il y a beaucoup trop d’abus surtout dans tout ce qui touche à l’enfance. Je suis vraiment très critique face à ces volontariats et je ne les encourage en aucun cas même si oui, l’intention est tout à fait louable et bonne. Je suis dans le milieu du développement international, et le volontourisme, ce dont tu parles dans ton article (et je vais en faire un article) est vraiment décrié pour diverses raisons, qui tendent tout d’abord à l’éthique, le blanc qui veut sauver le monde, donneur de leçon; mais aussi la misère et les pays en développement qui deviennent un parc d’attraction. De même souvent ces volontariats de courte durée peuvent faire plus de mal que de bien, il y a des études prouvant que les enfants peuvent developper des troubles émotionnels, du comportement et des carences dans leur éducation (les profs qui s’enchainent, qui n’ont aucune pédagogie/compétence que celle de parler anglais mais pleine de bonne volonté; les profs qui les laissent tomber en cours parce que tu comprends mon voyage doit continuer). Les autres raisons que je peux te citer sont la déprofessionalisation du développement international, sa monétisation, l’assistanat que cela développe, etc. Je n’ai rien contre le volontariat, je suis moi-même partie en tant que VSI, mais avec un cadre, p, avec une mission claire, en ne pensant pas sauver le monde, et parce que j’ai des compétences et que ma seule volonté ne suffit pas (c’est exactement ce que l’on cesse de répéter lors catastrophes naturels, vouloir aider en allant sur le terrain n’est pas une bonne idée, on devient alors un poids pour les professionnels qui doivent s’occuper de la sécurité du plus 1 mais aussi de son logement, sa nourriture)(les gens sur le terrain ont fait des études pour être là où ils sont, on a un bac+5 pour la plupart comme un ingénieur). Bref je pourrais continuer comme ça longtemps. Bises
oui je suis totalement d’accord avec toi et c’est ce que je souhaitais raconter dans cet article. Est ce qu’il n’est pas clair ? C’est le deuxième commentaire que je reçois dans le même sens.
Merci pour cet article ! Je l’ai trouvé personnellement très clair, je pense que les commentateurs voulaient juste abonder en ton sens 😉
Bonne continuation et bonne route vers ailleurs !
Ok tant mieux 😉
Bonjour Guillaume, si jamais j’en ai fait un article, je trouvais ça trop important pour ne pas m’exprimer sur le sujet 😉 http://www.jaiecrit.com/2016/01/05/partir-faire-du-volontariat-oui-mais-bien/
merci pour ce partage d’article très bien écrit. Je vois que le blanc qui soigne des bobos et est promu automatiquement médecin n’est pas arrivé qu’à moi…
Hello !! Je suis actuellement en voyage en Asie du Sud est et en ce moment au Cambodge avec mon copain. Nous voulons vraiment vivre une expérience comme celle ci durant notre voyage. Malheureusement quand je cherche sur internet je ne trouve que des projets de 1 mois ou 3 mois minimum dans des organismes qui demandent un financement élevé pour l’association.
Comme nous voyageons nous serions disponibles que pour quelques jours voir une semaine, aurais tu des bons plans pour trouver cela ? Ou le contact de l’école ? Je te donne mon adresse mail si tu veux: eulalie62100@gmail.com
Merci beaucoup
Eulalie